Plus l'on vieillit, plus le temps s'écoule rapidement.
Tel des grains de sable pris à la volée sur une plage déserte, il nous file entre les doigts, élégant, rapide et insaisissable.
Nous passons du stade de nouveau-né à celui d'adulte en un claquement de doigts. Nous ne sommes en réalité que semblables à ces petits grains de sable, jouets d'une réalité que nous ne pouvons diriger.

Cela vous apparaît sûrement comme une évidence.
Mais croyez-moi, lorsque l'on voit de nos propres yeux la Mort, approchant à pas comptés, de sa démarche légère et dansante, sensuelle et menaçante... On ne croit jamais aussi fort à cette terrible vérité.

Et maintenant que je suis là, acculée à ce mur, tremblante, le front trempé de sueur glacée, j'en fais à mon tour la douloureuse expérience.
Je suis pourtant calme. Parfaitement calme. J'attends ma fin, sereine.

Les opposés s'attirent, a-t-on dit. Je ne peux que confirmer.

Il s'approche, terrifiant, d'une beauté mortelle. Noyée dans son regard de braise, je ne peux esquisser aucun mouvement, ni contrôler les soubresauts qui agitent mon corps malgré l'immobilité de mes pensées.
Il dirige mes moindres gestes, me réduisant à l'état d'une vulgaire poupée de chiffon. Personne ne pourrait s'opposer à cette force oppressante.

Je ne puis qu'attendre que la Mort vienne me cueillir, semblable au vent qui emporte une plume solitaire, perdue par un oiseau de passage.
Et repenser aux causes de cette fin si facile.
À cette mort rapide, mais si douloureuse qui s'avance lentement, envoûtante, vers moi.

Au fond, j'avais toujours voulu mourir tôt. Lâchement. Pour échapper aux secondes, aux minutes, aux heures qui défilent si inexorablement.
Et pourtant... Je me souviens.

Je me souviens de la cause de cette mort irrévocable.
Le Destin de chacun peut vaciller à n'importe quel moment, poussé par une simple parole, un simple geste, à l'instar de la flamme vacillante d'une bougie fragile.
Et tout ceci peut devenir tellement... Parvenir à de telles extrémités pour...

Un vent d'hystérie me traversa alors, et je ne pus résister à cette bouffée de bonheur, cet échappatoire à la gravité de ma situation.
J'éclatai de rire, un rire nerveux, en pleurant presque.

Mon agresseur marqua alors une pause, avant de reprendre sa marche gracile dans ma direction.
Celle de ma Mort.